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mardi 4 janvier 2011

Paracha Bo : l'assimilation

Pendant que les enfants d'Israël célébraient le Sédér en Egypte, le premier Sédér de l'histoire, l'Eternel envoya la dixième plaie sur l'Egypte. Le quatorzième jour du mois de Nissan, chaque famille devait abattre rituellement un agneau et asperger de son sang les deux montants et le linteau des maisons. L’agneau était consommé cette nuit même, rôti au feu, accompagné de Matzoth et d'herbes amères, la ceinture aux reins, les chaussures aux pieds, le bâton à la main.

Jusqu'à ce moment là, les enfants d'Israël étaient passifs, subissant amèrement l'esclavage et assistant en spectateurs aux plaies d'Egypte. A présent l'Eternel attend d'eux un geste de courage : affirmer leur identité face aux égyptiens en mettent le sang de l’agneau, l’une des divinités d’Egypte, sur les montants des portes de leurs maisons.

Engloutis dans les ténèbres

Pendant que les enfants d'Israël mettaient de côté les os entiers, restes de l'agneau pascal, se produisit une grande clameur en Egypte. Il était minuit. De chaque maison retentissaient des cris et des pleurs, il n'y avait point de maison qui n'abritât pas un mort. C'était la dixième plaie annoncée au Pharaon, la plus terrible : la mort des premiers nés. Le Pharaon se décida enfin à laisser partir les Hébreux.

Les étrangers vivant en Egypte furent aussi touchés par la dixième plaie. Pourquoi les étrangers ? Quel étaient leurs crimes ? Rachi nous dit qu’ils étaient témoins du malheur d'Israël et ils n'ont pas compati.

A ce sujet, un Midrach raconte que lorsque le Pharaon exposa son projet de « solution finale » pour le peuple Hébreu, Job, l'un de ses conseillers se tut et ce silence lui vaudra le silence de Dieu lorsque plus tard, il sera lui-même plongé dans l'épreuve et la détresse. (Job 42/10).

Vahamouchim, généralement traduit « Les enfants d'Israël avaient quitté l'Egypte en emportant des armes », pourrait signifier « un cinquième » Un juif sur cinq seulement sortit d'Egypte. Les quatre cinquièmes du peuple avaient péri lors de la neuvième plaie des ténèbres.

Pour mériter de sortir d'Egypte, il fallait une foi sans faille; il fallait aussi le vouloir. Ce n'est pas difficile à comprendre. Depuis près de deux mille ans les juifs répètent « L'an prochain à Jérusalem », mais quand Jérusalem s'ouvre à eux, librement, largement et chaleureusement, ils ne réagissent pas. Non seulement ils ne se précipitent pas pour y habiter, mais combien à ce jour, sont-ils ceux qui n’ont pas fait l'effort d'aller au moins lui rendre visite ? L'histoire est-elle un éternel recommencement ?

Identité

Bien des facteurs pourraient être avancés pour expliquer le faible pourcentage d'engagement au sein du peuple juif. Le mariage mixte n'est que la conséquence d'une assimilation galopante.

L'assimilation est le phénomène le plus naturel qui soit. L 'homme a tendance à se fondre dans le milieu ambiant. Il a horreur de se distinguer, surtout lorsque la mise à l'écart engendre des problèmes au niveau de la profession, du statut social ou simplement du bon voisinage. Préserver sa personnalité nécessite beaucoup de courage et de persévérance.

Le Midrach nous dit que nos ancêtres ont mérité d'être délivrés de l'Egypte parce qu'ils avaient conservé leurs noms, leurs habits, et leur langue. C'était de l'héroïsme. Aujourd'hui encore, être juif au quotidien est une forme d'héroïsme. C'est peut-être ce mérite qui nous vaut la bénédiction divine. Se savoir juif suffit-il pour assumer sa condition ?

En Diaspora, l'assimilation est aujourd’hui facilitée par les conditions de vie du Juif. Il n'est plus soumis à une pression quelconque. Il peut se fondre dans la masse sans soulever de problèmes majeurs. Il n'a même plus besoin de se convertir à une autre religion, ni changer de nom. Il existe dans le monde un tel brassage de population que personne ne se distingue plus de manière particulière. Ceux qui veulent demeurer juifs à cause de leur foi en Dieu, de la conscience qu'ils ont de leur histoire, de l'amour qu'ils portent à leur patrimoine, ne peuvent donc plus se permettre d'être superficiels. Pour transmettre la tradition à la génération montante, il faut un contenu sérieux, attrayant, dense. Le message doit être clair, vivant, source d’inspiration. Nos enfants sont exigeants et ils ont raison de l'être dans un monde sans frontière, porteur de l'idéal de fraternité universelle, et d'ouverture, dans un monde où la science et la technologie remplissent notre vie, tout en y créant, le plus souvent, un vide spirituel. Dans cet environnement, nos enfants ont besoin de vraies réponses étayées par l'histoire de notre peuple, éclairées par le génie de notre tradition. Il n’est jamais trop tard pour y penser et pour retrouver le chemin de l’authenticité.

Grand Rabbin Jacques Ouaknin

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